((From Noise, 29 September 2008)
Killing Joke 26 & 27 / 09 / 08 Paris (La Trabendo)
Killing Joke de retour, sous sa formation originelle qui plus est, soit les inamovibles Jaz Coleman et Geordie Walker respectivement au chant et à la guitare, accompagnés de Paul Ferguson à la batterie et Youth à la basse. Killing Joke attire toujours une populace bigarrée qui comprend son lot de vieux hard rockeurs/punks avinés aussi répugnants qu’idiots pour qui le pogo bourrin signifie l’instant de liberté suprême. Sans compter les gothos, à l’air sérieux et dédaigneux, que le ridicule n’a pas tué… uniquement parce qu’il ne tue pas. Il faut donc bien choisir sa place en fonction de ses voisins de quelques heures, puis faire fi d’eux autant que possible. Killing Joke est censé interpréter ce soir son premier album éponyme et What’s This For? , tâche dont il va s’acquitter tout en s’autorisant quelques écarts, comme l’intrusion du superbe « Eighties » extrait de Night Time, en sept ou huitième position. Le set abrasif, primitif et tribal à souhait, introduit par les thèmes de Eyes Wide Shut et Blade Runner, est donc un véritable retour aux sources, et fait la preuve éclatante du caractère vraiment novateur de ce quatuor autant inspiré à ses débuts par le dub que le punk. Deux genres qu’il agglomère alors en une matière sonore unique, produit des jeux si singulier de chacun des musiciens : Ferguson ne tient que des rythmes à la puissance métronomiquement tribale, Geordie sort de son instrument un magma harmonique, Youth impose une basse bien ronde et ample en opposition à la rugosité des guitares et aux sonorités d’apocalypse du clavier. « The Wait », « Follow The Leader », « Wardance » puis quelques surprises telles le fabuleux « Pssyche », chanté à tour de rôle par Youth, Coleman et Ferguson ou « Are u Receiving? » sont jouées. Une heure trente de transe sonique, orchestrée par un Coleman en grande forme – une bonne quinzaine de kilos en moins – un Youth visiblement heureux d’être là, un Ferguson qui n’a rien perdu de sa force et un Geordie dont le flegme très britannique rompt avec la puissance des saturations. Mais le meilleur restait à venir le second soir, avec un set beaucoup plus varié explorant au final de nombreuses époques de la carrière de Killing Joke. Ferguson et Youth n’ont semble-t-il pas rechigné à apprendre certains titres qu’ils n’ont pas composés. Cette deuxième soirée le quatuor doit jouer l’intégralité de Pandemonium et les singles des années Island, soit des titres que les « puristes » n’apprécient guère, à leur grand tort. Il n’en est rien donc, puisque la playslist bien qu’articulée autour du génial Pandemonium en oublie trois titres : « Jana », puis « Mathematics Of Chaos » et « Millenium » pourtant tous deux prévus sur la set-list. Un Pandemonium au ¾ donc, dont les « Witheout », « Communion » et autre « Exorcism » fonctionnent toujours à merveille et que Ferguson s’approprie idéalement. A en croire Coleman, Big Paul était pressenti pour jouer sur l’album ce qui ne s’est finalement pas fait pour d’obscures raisons, comme toujours. Le batteur aurait cependant émis le souhait d’interpréter ces morceaux sur cette tournée pour finaliser les idées qu’il leur avait destinées à l’époque. Le reste de la set-list comporte certains titres déjà joués la veille (« The Wait », « Wardance », « Eighties ») et d’autres plus rares, citons « The Hum », « Asteroid » ou « Money Is Not Our God » durant lequel Coleman s’empresse d’empocher un billet de 5 euros tendu par un fan du premier rang tout en lançant un « seulement 5 ? ». Et « Love Like Blood », dédié ce soir à Paul Raven. Deux soirées d’exception donc, auxquelles le public aura répondu présent puisque affichant complet. Une petite pensée tout de même pour tous les losers qui se sont fait chier devant Wire à la Maroquinerie, après tout, ils ne pouvaient pas prévoir…